Les âmes abîmées
Enfanter c’est biologique, avoir de l´amour maternelle n’est pas donné à toutes :
Pas toutes les femmes qui enfantent, sont capables d’être mère. S´il y a trop de traumatismes liés à son histoire personnel, c’est un devoir envers soi-même et envers les autres de se guérir. Eviter de reproduire les mêmes graves erreurs de retransmission de malheurs personnels et conflits générationnelles. Mais c’est rassurant de savoir, tous les enfants abusés ne deviennent pas des adultes maltraitants si ils ont été entourés, soutenus ou font preuve de résilience.
La femme qui m’a enfantée, a été maltraitée, rejetée par sa propre mère. Elle ne se trouvait pas belle et pas aimée, selon ses propres dires. Tout d´abord, elle ne me voulait pas. Elle avait essayé de m´avorter, avec des médicaments de bonne-femme à l’époque, ça n’avait pas marché non plus. Elle avait beaucoup souffert lors de l´accouchement, failli mourir même, au point que le médecin avait choisi de sauver la mère plutôt que le bébé, moi. Elle voulait un garçon pas une fille. Donc quand je suis arrivée au monde, elle ne s’occupait pas de moi. Heureusement, mes grands parents se sont occupés de moi et même choisi un prénom. Les maltraitances ont commencé quand j’étais encore petite. Elle se vantait plus tard quelle m´attachait avec une corde aux pieds de la table, pour que je ne puisse pas courir ou jouer. Elle jetait mon biberon au loin par terre pour que j’aille le chercher. Si je préférais aller vers les autres, et pas vers elle, elle me pinçait pour me faire pleurer.
Mon enfance :
Ensuite quand ma sœur est arrivée (qui ressemble physiquement plus à la mère), elle s’est occupée d’elle et à éloigner mes grands parents. Je ne me souviens pas d´une seule fois de ma vie, ou cette femme m´a appelé par mon prénom. J´étais son souffre douleur, elle m´appelait „CA“ et par des insultes (les plus dégradantes et inhumaines) bref je n´ai jamais entendu mon prénom dans sa bouche.
Elle interdisait mes frangins de jouer avec moi. Elle arrachait les jouets, et disait aux autres, que „ca, est très méchante, il ne faut pas jouer avec elle“. J´avais 5 ans. Un jour je jouais sur un canard roulant avec mon frère, elle nous a séparé violemment et lui a ordonné de ne plus jouer avec moi. Elle exigeait déjà toute petite que je fasse toutes les tâches ménagères. J’ai grandi en entendant continuellement, tu as 7 ans maintenant, 8 ans, 9 ans maintenant, tu es la plus grande, tu dois t´occuper de tes frères et sœurs, faire les tâches ménagères. A la moindre dispute, elle me frappait. Parfois il ne fallait même pas de dispute du tout, seule ma présence lui suffisait pour m’insulter et me frapper. Elle a cassé des centaines de cuillères en bois, chaussures en me frappant. Ensuite, elle rigolait en me voyant pleurer, sadique. Je m’efforçais de ne pas pleurer devant elle, car c’était une double peine, mais elle me frappait plus fort si je ne pleurais pas..A manger, elle me servait en dernier ou faisait exprès de me servir moins, parfois elle mettait la nourriture comme à un chien et observait l´humiliation, elle me ferait porter les vêtements de ma sœur, qui était plus jeune que moi. Elle me laissait aller à l’école toute seule ou avec ma sœur. Une fois je suis arrivée en retard, pour une raison à l’école, elle m´a frappé, à 6 ans. J’étais souvent malade enfant, à cause de ses maltraitantes, on m’emmenait toujours très tard chez le médecin ou pas du tout. J´étais allergique aux acariens, aux poussières. J´ai eu de l´asthme car il aurait fallu changer les coussins pour cela. Et comme le père était très radin, il n’avait fait aucun changement. J’avais des crampes continuelles aux jambes à cause des carences de vitamines, magnésium, des problèmes gastriques tout le temps. A l´école, les maîtres, maîtresses disaient que j’étais souvent dans la lune. La mère me ferait prendre des douches brûlantes. Elle déchirait et jetait à la poubelle, les dessins que je faisais, et me frappait, „ il ressemble à Ca, ton père, hein?. Elle me frappait aussi car mon écriture manuelle n’était pas jolie, comme la sienne.
Le père :
Il n’a jamais pris le rôle du père, un grand égoïste, et un radin avant tout. Il ne manquait pas de me faire savoir à chaque occasion qu íl n’avait pas d´allocation enfant pour le premier enfant. Il ne fallait surtout pas dépenser, les choses ne devait pas s’user. De plus, un mythomane avec le syndrome du messie. Depuis la mère avait divorcé de ce „vaut-rien“. Il ne sait jamais souvenu d´aucun anniversaire, il nous oubliait dehors. Pour lui, les enfants ne servent à rien, et sont la possession des parents, les enfants n’ont pas de besoins, ils ne sont là que pour servir les parents.
Quand ma grand mère était là, c’était elle, la souffre douleur de la mère, elle crachait dans son assiette, elle la bousculait, jetait ces affaires. La mère m’a même emmené quelque fois chez un marabout pour ensorceler ma grand-mère, pour qu´elle ait le cancer.
A la puberté, elle a nié toute ma féminité, elle m’achetait pas de sous-vêtement quand j’avais eu mes premières règle. Il fallait que j’attende que ma sœur plus jeune atteigne la puberté. Très envieuse, la mère rentrait dans une rage furieuse. Si je portait du vernis à ongle, si je me maquillais ou m’habillais de façon féminine, elle me frappait maintenant avec un chausse pied en fer. J’avais renoncé complètement à être féminine à cette époque. Je m’étais exclusivement que des baskets ou un jogging. Je marchais comme un garçon, j’étais complètement un tomboy, pour ne pas réveiller sa rage.
Il fallait que je prenne la douche après tous, froide car cela fonctionnait avec un chauffe eau. Elle poussait mes frangins à m´insulter. Elle fouillait devant moi dans mes affaires, et prenait ce qu’elle voulait. Je ne devais pas lui adresser la parole, ni mes frangins. je ne devais pas m´assoir sur le canapé ou rester dans la même pièce qu’eux. Je ne devais pas avoir une double des clés, j’étais complètement dépendante de leur horaires, qu’ils me communiquaient évidemment pas. Elle fermait à clef, plaquant la nourriture. Je n’avais pas le droit d’utiliser la machine à laver, elle mettait de côté mes vêtements quand elle faisait une machine.
J´ai essayé de me rendre forte, comme j´ai pu à l´époque. Je lisais beaucoup de livres sur la guerre, j’avais apprise par cœur poésie de primo Levi. La philosophie était ma matière préférée. Mon refuge était les études et l’école. C’est pour cela que j’ai certainement effectué un parcours scolaire exceptionnel.
„Va te suicider, mais pas ici, va te suicider chez ton père!
Cette femme a essayé de me détruire de toutes ces forces, de me déshumaniser, massacrer ma personnalité. Mais elle avait une autre obsession, une rage, c’était de me tuer physiquement, mais elle ne voulait prendre aucune responsabilité pour cela. Elle me poussait au suicide. Elle criais plusieurs fois par jour „ va te suicider, mais pas ici, va te suicider chez ton père! Tu es encore là, tu n’es pas morte encore?
Je pleurais tous les jours à l’école, j’avais tellement d’hématomes que je ne pouvais même plus marcher. Au bord du gouffre, j’avais appelé le père au secours, il m’a simplement dit j’ai pas de place pour moi chez lui. Bien qu íl avait une chambre libre mais entièrement remplie de cartons et de déchets (syndrome de messie). Et à force d’entendre tous les jours, va te suicider, et le calvaire inhumain que je subissais au quotidien, je n’avais plus la force de vivre, bien que cette décision n’était pas la mienne. J’avais piqué les boîtes de somnifères à ma mère et j’avais décidé d´y mettre fin. Ce jour là. on m’avait convoqué au bureau de la directrice car le prof avait signalé que je pleurais tout le temps en cours. Ma meilleure copine à qui j´en avais parlé quand j’avais craqué, avait confisqué les somnifères, et ce jour là, on m’a placé directement au foyer de l´enfance pour me protéger. L’école m’a sauvé. Ils ont mis à mère en garde à vue. La dernière fois que je l’ai vue, elle avait les menottes aux mains et au au tribunal. Ensuite, s’en ai suivi avec la condamnation en pénale de la mère, elle avait essayé de jouer la comédie, en hurlant en pleurant en niant tous les faits, en essayant de berner les gens dans sa situation de femme seule avec enfants à charge. Le tribunal l’a tout de même condamné à 5 ans de prison avec sursis pour maltraitance sur mineure et l’interdiction de m’approcher à moins de 500 mètres. Il était même apparu un article dans les journaux.
Un jour, j’ai regardé un reportage sur le trafic humain en Thaïlande. Une femme de campagne était envoyé par sa famille pour une meilleure vie dans un pays alentour. Arrivé dans ce pays, on lui avait pris son passeport, et elle devait être esclave et fut violée continuellement par son bourreau. Par un miracle, elle avait pu s’enfuir quand son bourreau fût arrêté. Elle avait gardé volontairement l’enfant, rentré chez elle, elle disait “à chaque fois que voit cet enfant, j´ai envie de le tuer, je l’étouffe jusqu’à ce qu´il perde conscience, à chaque fois que je repense à cet enfant, je repense à que ce violeur m’a fait. Je le garde ici, seulement comme souffre douleur, pour le frapper quand je me sens mal.”
Ce jour-là j’avais définitivement compris que certaines femmes ne pouvaient pas aimer leur enfant, ne serait ce que leur présence n´est que la haine de destruction dans les yeux de la mère.
Si j’avais pu choisir, je n’aurais pas choisi ce père et cette mère. Je ne peux et ne veux pas pardonner leur crimes, et ce n’est même pas nécessaire. Je ne me souviens pas d´une seule fois, et d’aucun des deux d’avoir été prise dans leur bras, ou de m´avoir dit „je t´aime; ou „excuse-moi“ ou „ je suis fière de toi“. Je ne veux simplement plus les revoir définitivement à aucune occasion comme c’est le cas depuis plusieurs décennies.
J´ai quitté le pays, pour me protéger car la mère avait envoyé le frère pour m´attaquer physiquement. La seule chose que j´ai voulu c’est oublier, et j´avais la rage de vivre.
Pendant les 20 ans prochaines années, j´ai eu flash-backs, des attaques de panique. J’avais le vertige en me regardant dans le miroir, à cause de toutes ces insultes et coups sans raison pendant des années. J’ai souffert de symptômes Post Traumatique, de dissociation (de l’impossibilité de me concentrer), de dépersonnalisation, d’anxiété, de dépression. J´ai eu des problèmes de santé, de poids (liés directement au manque d´affection et l´histoire familiale). J’avais transporté cette culpabilité car ce monstre avait dit à tous que je l’avais envoyé en prison et que j´étais morte (encore cette obsession). J’avais terriblement honte d´avoir été déshumanisé comme ca. Ce n’étaient pas les valeurs et l´amour que mes grands parents m’avaient transmises. J`ai suivie presque 3 ans de thérapie traumatique avec l´EMDR auditive, plus une année de thérapie traumatique cognitive à venir.
Pour les grands traumatisés, il faut beaucoup de temps pour guérir.
J´avais décidé de transformer ces blessures profondes de l´âme en moteur de vie et de succès. J´ai essayé d´accepter que cette expérience qui me permet de ne jamais oublier ce qui est essentiel à la vie. Je me suis efforcée de reconstruire ma personnalité.
L´écriture de poésies, le sport, les arts (peinture, musique), la spiritualité, la philosophie, les études m’ont beaucoup aidé à vivre et à retrouver ma dignité.
J´ai repris et financé de brillantes études, j’ai créé ma propre entreprise, je parle 4 langues couramment, je fais un métier qui me passionne et me donne une belle satisfaction intérieure. J´ai voyagé jusqu`à en être ivre, et je continuerais autant que possible. Et j´ai encore des rêves pleins la tête. Dans ma vie et dans ma profession, d´innombrables amis proches m’entourent aujourd’hui, me donne énormément d’estime, d’amour, de respect et d’admiration, pour mon parcours professionnel, mes projets et tout simplement pour la personne que je suis. Je peux dire sans hésiter que j’ai réussi aujourd’hui, même dans un autre pays ou je me sens bien. Aujourd’hui, j´ai des privilèges, du pouvoir où les gens respectent mon autorité. J’utilise cette influence pour apporter une inspiration positive à la société, à l´humanité à laquelle j´ai toujours crue. La construction d´une vie à deux, à pris du temps à cause de ma biographie mais j’aimerais avoir des enfants, leur donner beaucoup d’amour, leur donner simplement des racines et des ailes.
Aujourd’hui j’aimerais témoigner car pendant longtemps j’ai essayé de cacher mon passé et avancer en aveugle dans sa vie. Accepter le passé fait partie de la recherche de ma identité, essentiel pour avancer.
La maltraitance entraîne des graves traumatismes à vie. Cela relève plus du miracle et des forces surhumaines que de vivre normalement après être avoir été fracassé ainsi. On paye très cher et très longtemps, et je peux comprendre facilement que la majorité des enfants maltraités finissent dans l´addiction ou sont malheureux, dépressifs, fragiles et malades, rare cas sont ceux y sans sortent brillamment. On est scarifié à vie, résilience ou pas. Frapper, insulter, déshumaniser un enfant est un crime grave qui doit être puni sévèrement par la loi. On doit écouter et entendre les enfants et déchiffrer leur souffrance, c’est un devoir de société, c’est un devoir humain. J´espère que mon témoignage inspirera d’autres victimes pour sortir du silence.
Laura M.