Comment tisser des liens affectifs avec mon enfant ?
La relation parent/enfant : la préparation affective
Dès le 5ème mois de grossesse, les organes sensoriels du bébé commencent à fonctionner et il est alors capable d’entendre les intonations et les sons de voix de ses parents, de ressentir certaines émotions, ainsi que des mouvements, et ceci, jusqu’à la naissance. Les gestes de tendresse et d’attention des 2 parents constituent les premiers échanges avec le bébé : ces contacts vont s’inscrire dans sa mémoire sensorielle et affective et nourrir son sentiment de sécurité. De ce fait, il est important de parler régulièrement à son bébé durant la grossesse et de le caresser au travers du ventre maternel pour lui manifester de l’attention et de la tendresse. Après la naissance, la voix de ses parents lui sera, de la sorte, familière, ce qui favorisera le développement d’une relation harmonieuse à trois (maman, papa et bébé).
«La préparation affective» s’effectue pendant la grossesse par le biais d’échanges affectifs et des jeux relationnels avec le bébé à naître. Elle permet au couple de créer un échange avec le bébé qui va favoriser le moment de la naissance ainsi que l’attachement lors des premiers mois de sa vie. Elle est pratiquée par des spécialistes et intègre des approches telles que, l’haptonomie périnatale, le chant périnatal, ou encore l’ostéopathie.
L’attachement entre une mère et son bébé est un besoin essentiel pour la survie du bébé et pour son développement. Elle se développe à partir de comportements innés (pleurs, succion, agrippement), qui permettent de maintenir un lien affectif avec la mère.
Dès les premiers mois de vie, les liens qui ont uni la mère et l’enfant pendant la grossesse continuent. L’attachement se renforce par l’échange relationnel : le bébé communique avec son langage qui lui est propre (il pleure, il s’agite, etc.) et les parents lui répondent en lui parlant, en le nourrissant, en lui souriant, etc. L’enfant apprend à faire confiance en ses parents ainsi qu’aux adultes importants dans son entourage (père, frère, sœur, grands-parents).
L’accordage affectif
On parle « d’accordage affectif1 » entre la mère et son enfant lorsque la maman répond adéquatement au vécu émotionnel de l’enfant et que ce dernier se sent satisfait et apaisé.
Exemple : 1) L’enfant a un vécu émotionnel (sourire, pleurs). 2) La maman, par un sourire, des paroles rassurantes, l’allaitement, ou encore un changement de couches, répond au bébé. 3) On voit une réaction de la part du bébé face au message reçu, il est satisfait, il s’apaise. |
Au cours du développement de l’enfant, la relation entre la mère et son bébé évolue. La mère intervient en fonction des émotions du bébé (sourire, mots tendres), pendant que le bébé commence à s’agiter (il se sert de sa tête, de ses mains, de ses pieds, de ses yeux et de sa bouche) pour évoquer des émotions. Lorsque sa maman s’occupe bien de lui, le bébé commence à sourire dès la 6ème semaine. Les liens existants entre la mère et l’enfant se renforcent. Le père aussi peut tisser des liens étroits avec son bébé, sa participation est importante dans cette relation à trois.
Le bébé a besoin de réponses adéquates, chaleureuses et prévisibles à ses besoins pour développer une base de sécurité et une image positive de lui-même. (exemple : quand il ressent une sensation désagréable, le bébé pleure, ou crie. La réponse adéquate de la part de la maman est alors de venir soulager l’enfant). La mère sait ce qui peut apaiser son bébé, elle arrive à reconnaître ses pleurs (s’il a faim, s’il est fatigué, s’il faut le changer,..). Si la mère apporte une réponse satisfaisante à l’enfant, celui-ci va progressivement comprendre qu’à chaque fois qu’il va ressentir une sensation désagréable, sa maman sera là pour y remédier. C’est ainsi qu’il se sentira en sécurité et qu’il deviendra plus patient.
L’attachement sécure
Plus de 2/3 des enfants développent des liens solides et sécurisants avec leurs parents. Ce sont des parents qui savent reconnaître et accepter toutes les émotions tant positives que négatives de leur bébé et qui y lui apportent des soins cohérents rapides et sécurisants. Ces enfants sont généralement heureux en la présence de leurs parents, ils vont jouer avec eux et rechercher leur affection. Les bienfaits d’un « attachement sécure » se font sentir pendant l’enfance et même par la suite. S’il s’établit un lien affectif avec au moins un de ses parents, l’enfant aura confiance en lui et en son environnement. Il deviendra de plus en plus disposé à vivre de nouvelles expériences, il sera prêt à être sociable, curieux, et à lier des liens intimes avec ses proches.
L’attachement insécure
Quand l’enfant n’a pas les réponses adéquates à ses besoins, sa base de sécurité, l’image de lui-même, sa confiance en lui et en l’autre, ne seront pas satisfaisantes. Il va développer un attachement angoissé, ambivalent, évitant ou désorganisé. Tous les parents ne sont pas aptes à offrir une attention adéquate et une satisfaction immédiate aux besoins de leur enfant. On retrouve ce genre de difficultés lorsqu’il existe des problèmes financiers, de couple, de santé, ou encore si les parents n’ont pas, eux-mêmes, été proches de leurs propres parents, ce qui implique qu’ils se savent pas toujours comment nouer des liens avec leur enfant.
Les interactions que le bébé va avoir avec les adultes vont influencer son développement affectif. On distingue trois niveaux d’interactions : comportementales, affectives, fantasmatiques.
Les interactions comportementales
C’est l’ensemble des échanges directement observables entre la mère et son bébé que l’on peut décrire selon 5 registres : les interactions corporelles, visuelles, auditives, vocales, et olfactives.
Interactions corporelles :
Ces interactions correspondent à la façon dont l’enfant est tenu, par la mère, et dont il y répond. On parlera :
- « d’ajustement corporel »: on peut observer soit un confort (détente corporelle, le bébé se blottit pour s’ajuster au corps de la mère), ou de l’inconfort (raidissement, le bébé s’arc-boute), qui peut affecter le bébé ou la mère, ou bien les 2.
- « dialogue tonique »: Le nourrisson participe activement aux caresses de la mère, aux échanges de regard et aux sourires qu’elle lui adresse.
- « Les contacts peau à peau » : câlins, caresses, chatouillements, baisers…
Interactions visuelles :
Sont un mode privilégié de communication entre sa mère et le bébé dès les 1ères semaines de vie. Dès 15 jours, pendant la tétée, il existe un regard mutuel entre la mère et son bébé, ce qui produit un effet valorisant chez la maman.
Interactions auditives :
Le nouveau-né tourne la tête ou les yeux dans la direction d’un son ou de la voix se ses parents.
Interactions vocales :
« Les cris et les pleurs du bébé » : quand la mère entend son bébé pleurer, elle essaie de comprendre ce qu’il exprime et fait tout pour mettre un terme à cet état de détresse supposé chez son enfant. On distingue des cris de faim, de détresse, … La fréquence et la durée des pleurs varient de façon individuelle chez le bébé. Si les pleurs sont trop répétitifs, les mères peuvent ressentir un sentiment de doute concernant leur compétence maternelle, un sentiment d’agressivité et de désespoir.
« Le langage de la mère à son bébé1 » est spécifique dès les premiers moments de vie de l’enfant. Il existe, ce qu’on appelle, le « parler-bébé » adapté à l’âge du nourrisson (le rythme de la voix est assez lent, les intonations plus élevées et le timbre plus doux.)
Interactions olfactives :
Au 4ème jour, le bébé peut différencier l’odeur de sa mère à celui d’une autre femme.
Les interactions affectives
Ces interactions sont caractérisées par l’influence réciproque de la vie émotionnelle du bébé et de celle de sa mère. La maman perçoit ce que ressent son bébé et lui propose une interprétation par des mots et des gestes… : « tu es content », « tu es fâché », « tu as envie de… ». Le bébé, à son tour, perçoit dans une certaine mesure, l’état affectif de sa mère. Il peut reconnaître si la mère est joviale ou anxieuse.
Les interactions fantasmatiques
La vie imaginaire et fantasmatique des parents est liée à leur vie affective, leur propre histoire et à leur relation avec leurs propres parents. Elle se construit progressivement à partir de celle de ses parents. Par conséquent, chez un nourrisson en bonne santé, les interactions qui vont faciliter un développement affectif harmonieux entre lui et ses parents dépendent essentiellement de 3 conditions :
- une disponibilité affective de la mère
- une souplesse des réponses des parents concernant les besoins de l’enfant
- de la stabilité, une continuité et une cohérence dans le temps de la part de ses parents et des personnes importantes pour le bébé
Lorsque que ces conditions ne sont pas remplies, les interactions seront perturbées.
Source : 1. Daniel Stern : « Le parler bébé » (simplification syntaxique, répétition des mots, lenteur, augmentation de la hauteur du timbre) adapté à l’âge |
Les causes possibles sont nombreuses :
– Les soins apportés au nourrisson sont inappropriés
– L’investissement affectif est ambivalent de la part de la maman : enfant non désiré, enfant handicapé
– Trouble de la personnalité chez la mère : mère dépressive, mère psychotique, existence d’une pathologie addictive du type alcoolisme
– Perturbations dans « l’accordage affectif » : inadéquation des réponses de la mère par rapport aux demandes/besoins du nourrisson (la maman ne va pas comprendre les pleurs du bébé)
– Excès de stimulation : Cela existe quand la mère ne tient pas compte des signaux que son bébé exprime quand il est débordé par les stimulations externes (fermeture des yeux, détournement de la tête, tensions sur son visage)
– Hypostimulation : Présente dans les cas de dépression maternelle (inhibition de l’intérêt pour son bébé et sentiment d’incapacité pour s’occuper de lui), ce qui engendre une réduction des échanges entre la mère et le bébé.
– Les carences affectives : on parle de carences quand un bébé est privé de sa mère ou d’un substitut maternel. Il peut véritablement en souffrir et tomber malade, surtout quand la séparation est brutale et intervient entre 6 mois et 1 an. Les effets de cette absence peuvent aller de la dépression réversible (apathie, refus de nourriture, ralentissement du développement psychomoteur…), à de graves altérations physiques et psychiques.
Toutes ces perturbations dans les interactions précoces, pourront faire apparaître chez le nourrisson, des symptômes cliniques, tels que des troubles psychologiques à expressions somatiques, ou encore une dépression du nourrisson.Voici quelques suggestions qui favorisent l’établissement de lien de confiance solides entre les parents et leur enfant :
– Respecter le rythme du bébé : La régularité dans les soins est importante (horaire des repas, du bain, du lever et du coucher). Plus cette régularité est respectée, plus le bébé se sentira en sécurité. Les rituels sont favorables au bien-être de l’enfant, notamment ceux du coucher qui permettent un meilleur endormissement. Le bébé, avant de s’endormir, a besoin de se sentir en confiance. Les parents peuvent lui chantonner une berceuse, lui raconter une histoire, ou encore lui chuchoter des paroles affectueuses.
– Réconforter le bébé : Lorsqu’un bébé pleure, il est important de venir le réconforter en venant le prendre dans ses bras, de le balancer tout doucement et de lui parler avec une voix douce et calme. On appelle cela le « holding » : « capacité de maintenir un enfant dans ses bras ». Le fait de tenir son bébé dans ses bras, le bercer, le regarder et lui parler », donne, ce qu’on appelle « une contenance » au bébé, lui permettant de ressentir la sécurité et la protection qui émanent de ses parents. Ce qui le rassure, le calme et lui donne envie d’aller plus loin dans les interactions (regards, gazouillis, caresses)..
– Apporter des soins appropriés au bébé : changer la couche du bébé quand celle-ci est mouillée ou quand elle est sale.
– Apprendre à être attentifs aux cycles naturels du bébé : sommeil et appétit du bébé
– Prévoir un moment d’attention privilégiée au bébé : prendre le temps de le prendre dans ses bras, de lui parler et de jouer avec lui.
– Les mamans doivent prendre soin d’elles afin d’être disposées à répondre adéquatement aux besoins du bébé et dans un minimum de délai : les jeunes mamans doivent prendre le temps se reposer et savoir demander de l’aide au conjoint ou à l’entourage si besoin.
– Savoir faire appel à des professionnels pour aider à résoudre certaines difficultés : financières, de santé ou de couple.
Article rédigé par Laure Deflandre, psychologue
http://www.passeportsante.net/fr/Actualites/Dossiers/DossierComplexe.aspx?doc=tisser-liens-affectifs-enfant